La Licorne, n� 80, � Jarry, monstres et merveilles � , �tudes r�unies et pr�sent�es par Patrick Besnier, Presse Universitaires de Rennes, 2007, 132 p. Il �tait logique que la Licorne, cet animal fabuleux � t�te de cheval muni d�une corne unique au milieu du front, ce monstre merveilleux, pour tout dire, s�int�ress�t un jour aux monstres et merveilles produites � foison par Alfred Jarry en ses litt�ratures. Il nous souvient d�avoir publi�, en notre jeunesse, un Jarry, le monstre et la marionnette1, o�, bien entendu, Ubu tenait la place centrale. Auteur d�une excellente biographie de Jarry2, Patrick Besnier a pris l�initiative de rassembler six �tudes portant sur le sujet, qu�il pr�sente si compendieusement et avec tant d�� propos qu�on ne saurait rien y ajouter, sauf � en conseiller la lecture. Pour �viter la r�p�tition, force m�est de consid�rer chaque contribution sans chercher � la classer dans l�une des deux cat�gories esth�tiques du monstrueux vs merveilleux. De fait, les contributions apparaissent r�parties en deux groupes de trois, selon leur longueur, en �tudes d�une part, recherches de l�autre. Reprenant l�analyse de C�sar Antechrist sur nouveaux frais, Julien Schuh d�montre fort savamment que cette pi�ce a �t� con�ue dans une perspective intertextuelle afin de la faire accepter par les Symbolistes. D�o� le recours � la litt�rature occultiste, d�Eliphas Levi � Stanislas de Gua�ta et m�me au S�r P�ladan. La d�monstration est convaincante tant � la philosophie occulte permet de relier chaque acte, de donner un sens global � l�ensemble �. Autre jeune chercheur inventif, Matthieu Gosztola revient sur les relations entretenues par ces deux contemporains qu��taient Jarry et Val�ry pour analyser leur commun d�sir de m�thode, s�opposant au positivisme triomphant. Et de convoquer la science nouvelle, notamment la g�om�trie non-euclidienne de Lobatchevski et la math�matique de Cantor, l�inventeur de la th�orie des ensembles, pour nous en convaincre, en les appliquant aux �crits de ces deux auteurs. Il emporte la conviction lorsqu�il s�attaque � l�un des textes les plus obscurs de Jarry, ou plut�t du Dr Faustroll, son calcul de la surface de Dieu. Pour sa part, Jean-Luc Steinmetz, qui n�a plus rien � apprendre, postule un nouveau type de commentaire s�attaquant aux difficult�s du texte jarryque, d�ordre talmudique, dit-il, qu�il applique � la lecture du roman Les Jours et les Nuits. L��tude (talmud, en h�breu), fort subtile, emporterait la conviction si le critique acceptait de livrer clairement les modalit�s d�analyse emprunt�es � la m�thodologie de r�f�rence, et surtout s�il ne faisait pas fi de la tradition (h�breu gabbalah) sous la forme des (rares) analyses de ses pr�d�cesseurs3. Suivent trois � recherches �, bien plus br�ves, qui, chacune � sa mani�re, tente d��lucider un point obscur de la cr�ation jarryque. Jacques Jouet examine les 17 sonnets r�guliers �pars dans son �uvre. apr�s les avoir d�crits formellement et en avoir montr� la grande vari�t� interne, il constate la co-pr�sence, dans ces po�mes, de Mallarm� et du mirliton, ce pourquoi il avance la notion de � mallarmirliton �. S�attaquant aux deux artistes inconnus de la revue L�Ymagier, Alain Jans et Richard Gheym, dont les initiales r�f�rent, respectivement � Alfred Jarry et � Remy de Gourmont, Jill Fell explique, de fa�on convaincante, le choix de ces pseudonymes et leur signification dans la tradition picturale. Enfin, Ben Fisher, auteur d�un ouvrage sur la biblioth�que du pataphysicien Dr Faustroll, apporte ici quelques pr�cisions sur les impr�cisions de Jarry, signe d�un jeu, d�une connivence avec l�auteur d�sign� pour chacun des � livres pairs �. � l�occasion du centenaire de la mort d�Alfred Jarry, voici donc un recueil qui lui rend un bel hommage, � l�intention de ses trop rares lecteurs.
Henri B�HAR 1. Henri B�har, Jarry, le monstre et la marionnette, Larousse, 1973, coll. Th�mes et textes (�puis�). 2. Fayard, 2005, 724 p. 3. On comparera ce texte � ma propre �tude : � L��criture du r�ve dans Les Jours et les Nuits �, in H. Bordillon, Alfred Jarry, colloque de Cerisy, Belfond, 1985.
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